Appel à Contribution « Industrialisation » en Afrique: vers de nouveaux modèles de croissance ?
Sous la Coordination de : Karim El Aynaoui (OCPPC), Ahmadou Aly Mbaye (UCAD) et Mihoub Mezouaghi (AFD)
Contexte
Les économies africaines ont connu au cours des deux dernières décennies une croissance économique soutenue. Cependant, ce regain de croissance demeure fragile, tiré principalement par un cycle haussier des prix des matières premières, et n’a pas entrainé une réelle transformation structurelle des économies africaines (Devarajan et Fengler, 2012). Cette transformation, qui est associée à une réallocation des ressources d’activités à faible productivité vers des activités à plus forte productivité (généralement de l’agriculture vers l’industrie et les services modernes), a joué un rôle crucial dans l’accélération de la croissance économique des économies émergentes.
En effet, le rôle stratégique des activités industrielles dans le développement peut s’expliquer par plusieurs facteurs. Premièrement, le développement d’une base industrielle (surtout manufacturière) favorise la diffusion technologique vers les autres secteurs productifs (effet de spillover). En plus, ces activités exercent un effet d’entrainement sur toute l’économie avec des implications sur la demande intérieure et l’emploi. Enfin, le développement des activités industrielles offre d’importantes opportunités d’expansion à l’exportation (Hausmann, Hwang et Rodrik, 2007).
Cette dynamique de croissance de long terme a justifié une intervention des Etats dans le processus de promotion de la transformation structurelle et du développement des capacités de production, en particulier par le biais des politiques industrielles volontaristes. Ces politiques visent d’abord de manière sélective la protection des industries naissantes (Soludo, Ogbu et Chang, 2004), pour ensuite corriger les défaillances du marché dans la phase d’ouverture à la concurrence internationale (Rodrik, 2004 et 2008).
Ces trajectoires de croissance se sont traduites par une industrialisation rapide en Asie orientale à partir des années 1960 et 1970. Après celle du Japon, l’expérience des quatre dragons (Corée du Sud, Hong Kong, Singapour, Taïwan), s’est ensuite étendue à d’autres pays de la région (Indonésie, Malaisie, Thaïlande, dans une moindre mesure aux Philippines) avant de s’élargir à la Chine, au Vietnam et plus récemment à l’Inde (Godement, 1993 et Radelet, 1997).
Les économies africaines peuvent-elles à leur tour s’inscrire dans un processus d’industrialisation alors que la plupart de ces économies a plutôt connu une désindustrialisation, caractérisée par une baisse de la part de la valeur ajoutée manufacturière depuis le milieu des années 1980. Cette « désindustrialisation prématurée » étouffe le potentiel de développement économique du continent en limitant l’application des technologies à la production et en générant des activités de services informelles et à faible productivité (Rodrik, 2013).
La problématique de l’industrialisation africaine se pose aujourd’hui dans un contexte très différent, celui d’une intégration plus poussée des économies au niveau mondial, et d’un processus dit « d’extension des chaînes de valeur mondiales – CVM ». Autrement dit, les processus de production et d’échange des biens et services (dans une moindre mesure) sont de plus en plus fragmentés, tant d’un point de vue fonctionnel que géographique. Cette « double fragmentation », rendue à la fois profitable et techniquement possible au cours des dernières décennies grâce à différents facteurs (progrès technique, baisse des coûts de transport, libéralisation du commerce et de l'investissement (Lall, Weiss et Oikawa, 2005), a accru le rôle des entreprises multinationales et leur poids dans ces CVM (60% du commerce mondial est intra-firmes)...
L’extension de ces chaînes de valeur offre-t-elle une opportunité pour le décollage des économies africaines ? Quel peut être l’impact de la transition du modèle de développement de la Chine, qui se traduira par une relocalisation d’une partie de ses capacités industrielles à proximité des marchés à plus fort potentiel de croissance ? Le développement d’une classe moyenne urbaine constitue-t-il un facteur de croissance ? Les dynamiques de transformation structurelle observées notamment en Ethiopie, au Maroc, au Kenya ou au Nigeria préfigurent-elles une transition vers de nouveaux modèles de croissance ? Quels sont les déterminants de ces dynamiques ?
C’est selon ce contexte que, l’OCP Policy Center (OCPPC), l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) et l'Agence Française de Développement (AFD), appellent à la soumission d’articles qui explorent les problématiques de croissance, de développement et d'industrialisation dans les pays africains.
Les thématiques retenues pour l’appel à contribution
Les propositions de communication devraient porter sur l’une des thématiques suivantes, la liste n’étant pas limitative :
- L’Afrique dans les chaines de valeur mondiales ;
- Les stratégies économiques des grandes puissances et des grands groupes industriels en Afrique ;
- Industrialisation et transformation locale des ressources naturelles en Afrique ;
- IDE et industrialisation en Afrique : y a-t-il des effets d’externalités ?
- Déterminants de l’industrialisation en Afrique ;
- Industrialisation et développement agricole en Afrique
- L’industrialisation et l’intégration régionale des économies africaines ;
- Cadre réglementaire, secteur informel et industrialisation ;
- Statut de l’entrepreneur et de l’entrepreneuriat ;
- « Désindustrialisation prématurée » des économies africaines : L’Afrique peut-elle poursuivre son développement sans industrialisation ?
- Politique industrielle versus neutralité du cadre réglementaire ;
- Industrialisation et inclusion financière ;
- Politique industrielle, croissance verte et développement durable ;
- L’industrialisation en Afrique et les défis du changement climatique.
Soumission des contributions
Les chercheurs intéressés sont invités à envoyer leurs papiers finalisés ou ébauches d’articles (les résumés détaillés ne seront pas pris en considération) avant le 05 Septembre 2016 à l’adresse électronique suivante : yassine.msadfa@ocppc.ma.
Les articles doivent contenir les noms, prénoms, institutions de rattachement et adresses courriels des auteurs, ainsi que les résultats analytiques et empiriques, les méthodes et approches utilisées, et les principales conclusions.
Les travaux retenus seront par la suite publiés dans un numéro spécial de la revue « Afrique Contemporaine » et feront l’objet d’une présentation lors d’une conférence organisée conjointement par l’OCP Policy Center (OCPPC), l’Université Cheik Anta Diop de Dakar au Sénégal (UCAD) et l’Agence Française de Développement (AFD).
Nouveau calendrier
Le 05 Septembre 2016 : Date limite de soumission rallongée des travaux de recherche
Le 05 Octobre 2016 : Avis du comité et notification des auteurs
Le 1er trimestre 2017 : Publication du numéro spéciale d’« Afrique Contemporaine »
Comité scientifique
- Abdelkhalek Touhami (Institut National de Statistique et d'Economie Appliquée Rabat)
- Brahim Morchid (Université Cadi Ayyad Marrakech)
- Damien Agbodji (Université de Lomé)
- Dominique Haughton (Bentley University)
- Felix Zogning (Université du Québec en Outaouais)
- Idriss Abbassi (Université Mohammed V Agdal Rabat)
- Jean Jacques Ekomie (Université Omar Bongo)
- Kako Nubukpo (Université de Lomé et Oxford University)
- Nancy Benjamin (Banque mondiale)
- Stephen Golub (Swarthmore College)
- Taladidia Thiombiano (Université d’Ouagadougou)
- Vincent Caupin (Agence Française de Développement)