Table Ronde: « Chine et Inde: Stratégies en Asie »
09:30 - 12:15, OCP Policy Center, Rabat
OCP Policy Center a abrité le jeudi 12 février 2015 une table ronde, organisée en collaboration avec l’institut français des relations internationales (Ifri), sur la thématique de « Chine et Inde : Stratégies en Asie ». La table ronde, qui a réuni des chercheurs, décideurs de politique étrangère Marocaine et étudiants, a été composé de deux sessions de présentation dont l’une basée sur un travail de recherche. Les participants ont par la suite eut l’occasion d’échanger avec les intervenants.
La première intervention de la table ronde a été effectuée par Alice Eckman, Chercheur associé au centre Asie de l’Ifri, sur le thème « Les motivations et les objectifs actuels de la politique étrangère chinoise dans la région, de l’Asie centrale à l’Asie de l’Est.»
Alice Eckman a présenté les résultats d’un travail de recherche qui analyse les objectifs de la politique de Xi Jinping en Asie et, plus précisément, dans le voisinage proche de la Chine. Selon ses recherches, cette région qui s’étend de l’Asie centrale à l’Asie de l’Est reste prioritaire pour Pekin.
Dans le but de réduire les inégalités et relancer la croissance économique dans les régions sous-développées chinoises, Pékin veut transformer ces dernières en routes de commerce « nouvelles routes de soie » avec les pays voisins. Ainsi, les régions Yunnan/Guangxi et Ningxia pourront servir de convoyeurs pour les produits chinois destinés à l’Asie sud-est et aux pays arabes respectivement.
Pour encourager les échanges commerciaux entre la Chine et ses voisins, Xi a tenu à perpétrer la politique de diplomatie économique initiée par Hu. Cela consiste principalement en des investissements importants en infrastructures dans les pays du voisinage, notamment ceux de transports.
Cette approche qualifiée de « soft » est accompagnée par une approche plus « hard » surtout sur les questions de conflits en mer de Chine. A travers cette double approche régionale, Pékin veut consolider sa puissance dans la région tout en limitant l’influence des Etats Unis et ses alliés dans la région.
Cependant, malgré les grandes ambitions de Pékin, sa politique étrangère régionale est encore en cours d’élaboration et ses initiatives dans la région ne sont pas le fruit d’une stratégie clairement définie mais d’un pragmatisme lui permettant de tirer avantage des opportunités qui se présentent au fur et à mesure.
La deuxième intervention de la table ronde a été effectuée par Isabelle Saint-Mezard, Chercheur associé au centre Asie de l’Ifri, sur le thème « L’Inde du premier ministre Narendra Modi : Premières orientations au plan extérieur.»
Pour l’intervenante, la politique étrangère de l’inde sous le leadership de Modi n’a pas connu de grands changements d’orientations mais juste un changement de style. Malgré son expérience internationale limitée, Modi a démontré d’un super-activisme diplomatique inattendu tout en restant prudent sur les politiques internes. Cependant, toutes les politiques étrangères et domestiques amorcées par Modi sont à fin économique.
Par le biais d’un système de gouvernance centralisé, le premier ministre, fort d’un mandat économique réussi dans sa région natale, parie sur le secteur industriel pour créer de l’emploi, sa principale promesse électorale. Cette stratégie économique s’est traduite en une grande campagne de promotion des produits manufacturés en Inde « Make in India.»
Dès les premiers mois de sa primature, Modi a mobilisé des financements importants en infrastructures de la part de certaines puissances asiatiques. Sa visite au Japon s’est concrétisée par une promesse du leadership nippon d’investir 35 milliards USD dans une période de cinq ans en infrastructures indienne. Quant à la Chine, c’est un engagement de 20 milliards USD qui a résulté de la visite du président Xi en Inde.
Modi a également réussi à réactiver le partenariat avec les Etats-Unis tout en obtenant des concessions importantes de ce dernier sur la question du nucléaire. A plusieurs reprises, le premier ministre indien s’est montré intransigeant sur les dossiers touchant à la sécurité de l’Inde, surtout avec les voisins. Dans ce contexte, l’Inde a procédé à un renforcement des zones frontalières. Face à d’autres puissances de la région, Modi a signé plusieurs accords de défense avec des pays comme l’Australie et le Japon ce qui a marqué le retour dans l’agenda diplomatique indienne des conflits en Mer de Chine.
Les discussions ont finalement fait ressortir que Modi reprend la doctrine de Nehru : l’Inde d’abord, l’Inde ensuite et l’Inde enfin. Il est clair que le premier ministre indien, bien qu’il n’ait pas révolutionné les orientations diplomatiques du pays, a su se démarquer par son style de gouvernance.
Programme
09:30 - 09:40 | Ouverture |
09:40 - 10:45
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Les motivations et les objectifs actuels de la politique étrangère chinoise dans la région, de l'Asie centrale à l'Asie de l'Est Intervenant Alice Ekman, Chercheur associé, centre Asie, Ifri Discutant Mohamed Maliki, Directeur des affaires asiatiques et de l’Océanie, Ministère des affaires étrangères et de la coopération |
10:45 - 11:15 | Pause |
11:15 - 12:15
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L'Inde du Premier ministre Narendra Modi : premières orientations au plan extérieur Intervenant Isabelle Saint-Mezard, Chercheur associé, centre Asie, Ifri Discutant Adnane El Ktiri, Responsable vente Asie du Sud & Moyen-Orient, OCP Group |
About IFRI :
Founded in 1979 on the model of Anglo-Saxon think thanks, Ifri is the principal institution for independent research and debate in France that is dedicated to the analysis of international questions and global governance.
Ifri’s policy-oriented research strives to illuminate international events and put them in perspective. It is primarily useful for political and economic decision-makers as well as academics, opinion leaders, and civil society representatives.
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Alice Ekman
Chercheur associé, centre Asie, Ifri
Alice Ekman est chercheur spécialiste de la Chine à l'Ifri. Elle analyse les principaux changements de politiques extérieures et intérieures du pays et les évolutions au sein de la société.
Elle est chargée de cours sur la Chine contemporaine à Sciences Po Paris et Lille, et intervient également à l’IHEDN et à l’Ecole de guerre.
Alice Ekman a été chercheur invité à l'Université Tsinghua (Pékin), chargée d'étude à l'Ambassade de France en Chine, puis consultante dans un cabinet de conseil en stratégie. Parlant le mandarin, elle conduit régulièrement des terrains de recherche en Chine et en Asie de l'Est, et dialogue avec plusieurs institutions publiques et privées françaises implantées dans la région.
Elle est membre du comité européen du Council for Security Cooperation in the Asia Pacific (CSCAP).
Alice Ekman est titulaire d'un master de la London School of Economics (Relations Internationales, Economie et Anthropologie - spécialité Chine), et d’un doctorat de Sciences Po, Paris (Science politique - programme Asie). Elle est également titulaire du diplôme de Sciences Po Lille, d'un DU de chinois de l'Université de Lille III et d'un Bachelor of Arts de l'Université du Kent en Sciences politiques, Economie et Philosophie.
Parmi ses publications récentes: Quelle importance la Chine accorde-t-elle à la France ? (Lettre du Centre Asie, Avril 2013), Le Maghreb vu de Chine : perceptions et orientations au lendemain des printemps arabes (Note de l’Ifri, février 2013), Chine : nouveau dirigeants nouvelles réformes ? (Politique étrangère, n° 2013/1), China’s Two-Track Foreign Policy – From Ambiguous to Clear-Cut Positions (Note de l’Ifri, décembre 2012), Chine : Délicate stabilité en période de transition (Ramsès 2013, Ifri-Dunod, septembre 2012).
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Isabelle Saint-Mezard
Chercheur associé, centre Asie, Ifri
Isabelle Saint-Mézard est maître de conférence en géopolitique de l'Asie à l’Institut Français de Géopolitique de l’Université de Paris 8.
Elle a auparavant travaillé comme analyste sur l’Asie du Sud pour la Délégation aux Affaires Stratégiques, du ministère de la Défense (2006-2011). Elle a aussi été chercheur pour le Projet Chine-Inde du Centre of Asian Studies/ Institute of Humanities, de l’Université de Hong Kong (2003-2006). Elle détient un doctorat de science politique, mention "Relations Internationales" à l'Institut d’Études Politiques de Paris.
Ses recherches portent sur la géopolitique de l’Asie du Sud, avec un intérêt particulier pour les questions stratégiques et de sécurité en Inde. Elle enseigne aussi à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris et à l’INALCO.